Nous avons récemment rappelé les formes requises pour les déclarations de témoins.

Pendant longtemps, il était considéré que les preuves obtenues illégalement, de manière irrégulière ou déloyale ne pouvaient servir de preuve et devaient être écartées.

La jurisprudence a évolué. Qu’en est-il ?

Le 10 mars 2008, la Cour de Cassation a prononcé un arrêt qui étendait sa jurisprudence dite “Antigone” aux modalités de preuve en matière civile :

“Sauf en cas de violation d’une formalité prescrite à peine de nullité, la preuve illicitement recueillie ne peut être écartée que si son obtention est entachée d’un vice qui est préjudiciable à sa crédibilité ou qui porte atteinte au droit à un procès équitable”

En cas de contestation, les preuves sont soumises par la Jurisprudence au test “Antigone” :

      1. une forme prescrite à peine de nullité a-t-elle été violée ?
      2. la fiabilité de la preuve est-elle affectée par l’irrégularité ?
      3. l’irrégularité porte-t-elle atteinte au droit à un procès équitable ?

Cette problématique sera fréquemment rencontrée en matière de roulage et fera chaque fois , soyons-en convaincus, l’objet de nombreux débats (éthylomètre non agréé, constats policiers irréguliers, contrôles de vitesse irréguliers..etc) et fait déjà l’objet d’une jurisprudence colorée.

En ce qui concerne les déclarations de témoins, le premier écueil sera, bien entendu la question de savoir si la fiabilité de la preuve a été affectée par l’irrégularité.

Ce sera le cas dans de nombreux cas, la déclaration émanant d’un tiers qui n’est pas présent, les formes mises en place par la Loi du 16 juillet 2012 (modifiant le Code civil et le Code judiciaire en vue de simplifier les règles qui gouvernent le procès civil ) ont pour objectif essentiel de garantir la fiabilité du témoignage.

Déjà le règlement du 12 octobre 2010 du conseil de l’Ordre des avocats du barreau de Bruxelles sur les relations de l’avocat avec les tiers pressentis pour établir une attestation écrite avait donné un cadre formel à ces témoignages.

Néanmoins, la jurisprudence Antigone laissera au magistrat un pouvoir d’appréciation. Il ne sera donc pas tenu de manière stricte au formalisme édicté par cette nouvelle loi.

Il faut ici regretter le manque de cohérence entre le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire.

À quoi bon mettre sur pied une réglementation fixant un cadre précis et édicter les formes d’un témoignage écrit si le magistrat peut, dans la pratique, considérer que la fiabilité de la preuve n’a pas été affectée par l’irrégularité ?

Compte tenu de cette jurisprudence, il appartient maintenant au législateur qui souhaite édicter des règles réellement contraignantes d’assortir leurs violations de la sanction de la nullité.

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