La victime d’un dommage a droit à la réparation de celui-ci. Dans la majeure partie des cas, il sera procédé à la réparation de ce qui a été endommagé. Il est généralement impossible d’utiliser pour cette réparation des pièces ou des matériaux usagés ou d’occasion. Faut-il déduire du devis de réparation un coefficient de vétusté ? La réponse est résolument NON

Dans une livraison récente du Forum de l’assurance, le Professeur FAGNART s’est livré à une analyse fondamentale de la question (plus-value et moins-value à la suite de la réparation ou du remplacement d’une chose endommagée ou perdue, Forum de l’Assurance, Mai 2013, n° 134, Jean-Luc FAGNARD)

Depuis, 1952 déjà, la Cour de Cassation a décidé que le dommage dont la réparation est due consiste non point dans la privation pour la victime du prix de la chose, mais dans la privation de la chose elle-même.

Cette solution, consacrée par un Arrêt de principe prononcé en audience plénière et régulièrement confirmé par des Arrêts innombrables, pose comme principe que la victime a droit à la valeur de remplacement de la chose dont elle a été dépouillée par un acte illicite, c’est-à-dire la somme nécessaire pour acquérir une chose semblable.

Il s’en suit, notamment, que lorsque la chose détruite est un bien immobilier, son remplacement implique une reconstruction.

La question de savoir s’il faut déduire de l’indemnité revenant à la victime un coefficient pour tenir compte de la vétusté a finement été analysée, en son temps, par le Professeur DALCQ : « La victime a droit à la réparation complète de son préjudice. Elle peut toujours exiger que cette réparation se fasse sans aucune perte pour elle. Sa créance est égale au dommage sans aucune déduction. Dès lors, si le seul moyen de réparer intégralement le dommage engendre un élément de bénéfice pour la victime, il faut que celui-ci lui reste acquis. L’enrichissement de la victime n’est pas sans cause, il n’est pas injuste, parce qu’il trouve sa cause dans l’acte illicite du responsable et dans l’obligation de réparer le dommage qu’il a causé. »

Le respect du principe de la réparation intégrale impose donc d’écarter la déduction d’un quelconque coefficient de vétusté, car une telle déduction risque, si le propriétaire ne dispose pas de liquidités suffisantes, de l’empêcher de procéder à la reconstruction du bien détruit ou au remplacement de celui-ci.(Fagnart op.cit)

La déduction d’un coefficient de vétusté est la négation de la réparation intégrale du dommage.(ibidem)

Il a parfois été fait une juste application de ces principes par la Jurisprudence : “lorsque les personnes préjudiciées ne peuvent ni faire réparer l’immeuble détruit, ni se procurer un immeuble de remplacement dans un état équivalent à celui du bien détruit (la reconstruction exclut l’utilisation de matériaux vieillis ou de techniques anciennes), elles sont fondées à solliciter la contre-valeur de la construction d’un bien neuf, même si elles en retirent inévitablement un certain enrichissement” (RGAR 1/2007 – p. 14206 – Tribunal de première instance Bruxelles 6e ch., 18/04/2005)

Hélas, trop souvent, la Jurisprudence n’applique pas ce principe essentiel avec rigueur.

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