Le fait de bénéficier de la priorité ne génère pas dans le créancier de cette priorité un droit d’abuser de celle-ci. Même si généralement, il est considéré que l’obligation de céder le passage imposée par les articles 12.3.1, 12.4 et 12.5 du Code de la route a un caractère général et est indépendante de la manière dont circule l’usager prioritaire, encore faut-il ne pas surprendre le débiteur de la priorité.

Le 11 mars 2009 vers 23 h 08, alors que G. quittait un stationnement et effectuait une manœuvre de demi-tour sur la chaussée, son véhicule a été percuté à l’arrière par un autre véhicule conduit par S..

Les policiers arrivés sur place ont procédé aux constatations d’usage et entendu les conducteurs impliqués.

Quant aux circonstances de fait, ils notent que :

  • la visibilité est bonne,
  • l’éclairage public est continu,
  • le temps est clair,
  • le revêtement de la route est en macadam et sec,
  • l’accident s’est produit en agglomération.

Le tribunal releva également que :

  • le pont de Jambes, d’où S. provenait, se situe à environ 200 m du lieu de l’accident et la vitesse est limitée à 50 km/h ;
  • les deux véhicules n’étaient pourtant plus en état de rouler après la collision et celui de la s.a. Matoul a nécessité des réparations s’élevant à 77.000 EUR H.T.V.A. ;
  • le véhicule Audi s’est immobilisé environ 120 m après la collision;
  • celui de G., qui quittait un emplacement de stationnement, a été éjecté de l’autre côté de la chaussée, qui comporte pourtant trois bandes de circulation ;
  • le témoin M. a déclaré que le véhicule Audi roulait à très vive allure, ce que paraît confirmer la déclaration de G.

Il résulte de ces éléments qu’une vitesse excessive dans le chef de S. est démontrée à suffisance, notamment compte tenu de la rapidité avec laquelle il a parcouru la distance entre le pont et la position de G., de la déclaration du témoin dont l’objectivité n’est pas remise en cause et de l’importance des dégâts.

Cette vitesse excessive a contribué à l’ampleur du choc et à l’aggravation du dommage subi par le véhicule conduit pas S.

Le tribunal énonça alors que l’obligation de céder le passage imposée par les articles 12.3.1, 12.4 et 12.5 du Code de la route a un caractère général et est indépendante de la manière dont circule l’usager prioritaire, pour autant que la survenance de ce dernier ne soit pas imprévisible.

La notion d’obstacle imprévisible doit être réservée à celui qui surgit brusquement devant un conducteur et que celui-ci ne pouvait raisonnablement prévoir. Un obstacle est imprévisible lorsqu’il se présente de manière rapide, si inattendue et à si courte distance que le conducteur qui s’en approche ne peut ni s’arrêter ni effectuer une manœuvre d’évitement sans danger pour lui-même ou pour autrui et que l’imprévisibilité ne résulte pas de la faute de celui qui l’invoque.

Le tribunal considérera que G avait incontestablement commis une faute en décidant d’effectuer sa manœuvre de demi-tour à un endroit où cela est interdit (ce qu’elle n’ignorait pas), en période nocturne, ce qui affecte sans nul doute la perception de la circulation, alors qu’elle avait pu appréhender la survenance d’un véhicule prioritaire, sans toutefois se donner la possibilité d’apprécier le comportement dudit véhicule prioritaire.

Le tribunal relèvera par ailleurs que, la conduite par S à une vitesse inappropriée contribue à la survenance et aux conséquences d’un accident, et ceci même si le conducteur en question était prioritaire.

Dès lors que chacun des conducteurs a contribué par sa faute à la survenance de l’accident, il y a donc lieu à partager les responsabilités et vu la gravité des fautes respectives des conducteurs, il paraît juste d’évaluer la responsabilité de chacun des conducteurs à 50 %..

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