La loi du 13.1.2012 a inséré dans la loi de 1992 une disposition aux termes de laquelle, Lorsque les héritiers légaux sont désignés comme bénéficiaires sans indication de leurs noms, les prestations d’assurance sont dues, jusqu’à preuve du contraire ou sauf clause contraire, à la succession du preneur d’assurance. Un arrêt de la Cour d’Appel de Liège du 30.6.2015 illustre l’importance et les possibles conséquences de ce changement législatif.

Madame Joséphine LX a souscrit un contrat d’assurance-vie en date du 30/6/2000.
Par testament olographe du 25/11/2004, les demandeurs ont été institués par madame LX comme légataires universels le 24/1/2006.
Le 29/11/2005, L’assureur est avisée du décès de madame LX survenu le 24/11/2005.

Les demandeurs manifestent leurs prétentions à toucher le produit de l’assurance, notamment par leur lettre circonstanciée du 16/1/2007.

L’assureur répond le 26/3/2007 en demandant communication d’un acte de notoriété.

Citation sera lancée le 25/5/2012.

L’action ne sera pas déclarée prescrite, dès lors que le délai de prescription a été interrompu le 16/1/2007 par la réclamation du conseil des demandeurs et que cette interruption n’a jamais pris fin, l’assureur n’ayant jamais fait savoir qu’elle ne paierait pas les indemnités en mains des demandeurs dès lors qu’elle n’a cessé de réclamer l’acte de notoriété mentionnant les héritiers légaux avant de pouvoir prendre position.

Quant au fond, le contrat souscrit par la défunte le 30/6/2000 attribue la qualité de bénéficiaire en cas de décès aux enfants nés et/ou à naître, par parts égales ; à défaut, les héritiers légaux de la personne assurée, sauf l’Etat.

Les demandeurs ont été institués légataires universels par testament de la défunte.

La désignation bénéficiaire est soumise à une règle de forme impérative dans la loi du 25/6/1992 sur le contrat d’assurance terrestre, l’article 106, al.2 fait référence à l’article 10 de la loi et donc à l’exigence d’un écrit.

Les héritiers légaux ont été expressément désignés par la défunte dans les conditions particulières de la police.

L’article 731 du Code civil définit précisément les héritiers légaux : Les successions sont déférées aux enfants et descendants du défunt, à son conjoint non divorcé ni séparé de corps, à ses ascendants [, à ses parents collatéraux et, dans les limites des droits qui lui sont conférés, à son cohabitant légal], dans l’ordre et suivant les règles ci-après déterminés.

La prétention des appelants ne peut se fonder sur l’article 110/1 de la loi du 25/6/1992 inséré par la loi du 13 janvier 2012 et qui concerne la désignation du bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie.

La loi est entrée en vigueur le 3 mars 2012.

 

Pour les contrats d’assurance-vie conclus depuis cette date lorsque les héritiers légaux sont désignés comme bénéficiaires sans indication de leurs noms, la prestation d’assurance est due, jusqu’à preuve du contraire ou sauf clause contraire, à la succession du preneur d’assurance.

Pour les assurances-vie conclues avant le 3 mars 2012 et qui contiennent la clause “héritiers légaux”, le preneur d’assurance peut, à l’initiative de l’assureur, déclarer jusqu’au 3 mars 2014, au moyen d’un avenant, qu’il renonce à l’application de l’article 110/1 .

Dès lors que la preneuse d’assurance est décédée le 24/11/2005, que les conditions générales du contrat précisent que le contrat prend fin en cas de décès de l’assuré, le nouvel article 110/1 ne peut trouver à s’appliquer au contrat litigieux car celui-ci n’est plus en cours après le décès de la tête assurée.

En outre, la lecture de la loi permet de conclure qu’elle ne peut s’appliquer aux contrats où le preneur d’assurance est décédé avant son entrée en vigueur puisqu’elle laisse à celui-ci la possibilité de renoncer à l’application de l’article 110/1, ce qui présuppose à tout le moins qu’il soit encore en vie.

L’assureur cite les documents parlementaires desquels il ressort que le Législateur a envisagé l’hypothèse où lors de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle le preneur d’assurance était décédé et les indemnités non liquidées, hypothèse rencontrée dans le présent litige, et que cette hypothèse n’a pas été intégrée dans le champ d’application de la nouvelle loi.

Les demandeurs soutiennent encore que le testament rédigé à leur profit serait une révocation implicite mais certaine de la clause bénéficiaire.

Or, en l’espèce la défunte n’a pas expressément révoqué ses héritiers légaux dans le cadre de l’assurance litigieuse lorsqu’elle a rédigé son testament et rien ne démontre qu’elle aurait tacitement mais de façon certaine révoqué la clause bénéficiaire.

La sécurité juridique impose de privilégier la volonté exprimée sans équivoque par rapport à des analyses d’intention faites par des personnes y ayant un intérêt direct.

Il en résulte que l’action des demandeurs n’est pas fondée dès lors que la défunte a réservé le bénéfice de la police à ses héritiers légaux dont l’existence a été prouvée en cours de procédure.

Ceci témoigne de l’importance de la réforme de 2012. Aujourd’hui, les demandeurs, en leur qualité de légataire universel, et en l’absence d’héritiers réservataires, auraient bénéficié de l’assurance vie.

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