Rien de plus difficile que de démontrer avoir été victime d’une effraction. Les techniques modernes et le talent de certains cambrioleurs ne permettent pas toujours d’établir avec certitude l’existence d’une effraction. Nous avons pu récemment obtenir une décision que nous ne pouvons que saluer.

Les victimes d’un vol avaient fait la déclaration suivante :

« J’ai fait appel à vos services suite à un fait de vol survenu ce jour soit le 03/04/14 vers 16 h 30.
Je suis rentrée chez moi et j’ai déposé des affaires quand j’ai remarqué que quelque chose n’était pas normal. Je suis repartie de l’appartement que j’ai verrouillé avant d’appeler la police. Je suis certaine d’avoir entendu du bruit avant que je ne quitte l’immeuble.
La porte d’entrée n’était pas forcée. Les auteurs sont probablement entrés par les toits (…) ».

L’assureur refusait d’intervenir au motif qu’il n’y avait aucune trace d’effraction visible.

Le tribunal rappela d’abord qu’il est admis, en matière d’assurance vol, que le régime de preuve est assoupli compte tenu des difficultés pour la personne ayant subi le vol d’en rapporter la preuve certaine.

La doctrine et la jurisprudence enseignent ainsi que l’assuré peut se contenter d’établir la vraisemblance du vol, laquelle est acquise lorsque l’assuré produit la déclaration du vol jointe à la plainte déposée auprès de la police.

L’assureur qui entend contester la réalité du vol doit, de son côté, démontrer l’existence d’éléments. de nature à jeter le discrédit sur les déclarations de l’assuré.

Se posait, ensuite, la question de l’absence de trace d’effraction.

Se fondant sur le fait qu’il est admis que c’est à l’assureur qu’il appartient de démontrer le manquement contractuel ainsi que le lien de causalité entre ce manquement et le sinistre, le tribunal examina les données de l’espèce :

En l’espèce, la défenderesse soutient que la porte d’accès au bâtiment n’était pas verrouillée en sorte que la mesure de prévention stipulée à l’article A9.l.4 c) n’a pas été respectée, ce qui constitue une cause de déchéance du droit à la prestation d’assurance.

Elle se fonde, une fois encore, pour justifier son affirmation, sur la circonstance que les lieux ne présentaient pas de trace d’effraction visible. Elle en déduit que la seule explication plausible était que la porte était uniquement fermée (« claquée ») sans avoir été verrouillée.

En l’espèce, il y a lieu de constater qu’une fois encore, la défenderesse se fonde sur l’unique circonstance que les lieux ne présentaient pas de trace d’effraction visible pour en déduire que son assuré aurait commis un manquement contractuel.

Cette seule circonstance n’est, en soi, pas suffisante pour démontrer le manquement consistant dans le fait d’avoir omis de verrouiller la porte.

A cet égard, il y a lieu de constater que la défenderesse ne produit aucune photo de la porte ni aucune explication sur le mécanisme de verrouillage de celle-ci. Elle ne produit pas plus le rapport de l’expert qu’elle a dépêché sur les lieux et qui pourrait fournir des éclaircissements supplémentaires.

Elle écrit d’ailleurs, elle-même, dans ses courriers adressés à l’assureur protection juridique des demandeurs qu’elle ignore si la porte était verrouillée ou non :

Courrier du 24 juin 2014 : « Nous ne sommes (à ce stade) pas encore intervenues, car on n’a pas de preuve que la porte était verrouillée » ; Courrier du 28 juillet 2014 : « Vous comprenez que sans preuve de notre assuré concernant le oui ou non être verrouillé de la porte on ne peut pas intervenir »

Dans la mesure où la charge de la preuve repose sur la défenderesse, le risque d’absence de preuve doit être supporté par cette dernière en sorte qu’il y a lieu de constater que vu l’incertitude qui prévaut quant au verrouillage ou non de la porte d’accès, la défenderesse ne démontre pas que ses assurés ·ont commis un manquement justifiant la déchéance de leur droit à intervention.

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