Un accident de la circulation est survenu impliquant deux véhicules dont un dans lequel une femme, alors enceinte de cinq mois et demi, occupait la place passager avant.

Le surlendemain, cette femme a dû être hospitalisée en urgence et est restée hospitalisée jusqu’à la naissance de son fils, né prématurément et ayant présenté par la suite un grave handicap.

La question qui se posait était de savoir dans quelle mesure il existait une relation causale entre l’accident d’une part, l’hospitalisation, la naissance prématurée et l’handicap de l’enfant.

Dans un arrêt du 14 novembre 2022, la Cour de cassation rappelle d’abord les principes applicables :

Il incombe au demandeur en réparation d’établir l’existence d’un lien de causalité entre la faute et le dommage tel qu’il s’est réalisé.

Ce lien de causalité suppose que, sans la faute, le dommage n’eût pu se produire tel qu’il s’est produit.

Le juge constate souverainement les faits dont il déduit l’existence ou l’inexistence d’un lien de causalité entre la faute et le dommage.

Aux termes de l’article 8.5 du Code civil, hormis les cas où la loi en dispose autrement, la preuve doit être rapportée avec un degré raisonnable de certitude.

L’article 8.6 de ce code dispose que, sans préjudice de l’obligation de toutes les parties de collaborer à l’administration de la preuve, celui qui supporte la charge de la preuve d’un fait négatif peut se contenter d’établir la vraisemblance de ce fait et que la même règle vaut pour les faits positifs dont, par la nature même du fait à prouver, il n’est pas possible ou pas raisonnable d’exiger une preuve certaine.

Il s’ensuit que le demandeur en réparation peut se contenter d’établir la vraisemblance des faits dont le juge déduit l’existence ou l’inexistence d’un lien de causalité entre la faute et le dommage, soit lorsqu’il s’agit de faits négatifs, soit lorsqu’il s’agit de faits positifs dont, par la nature même des faits à prouver, il n’est pas possible ou pas raisonnable d’exiger une preuve certaine.

Le jugement querellé fait alors une analyse du rapport d’expertise et déduit de l’ensemble de ces considérations que peut être entériné « l’avis de l’expert Ce., selon lequel ‘la relation entre l’accident survenu le 15 juin 1991 et la naissance prématurée [du premier défendeur] est hautement probable », les alternatives, bien que non complètement impossibles, n’apparaissant pas vraisemblables » et que « les [trois premiers défendeurs] rapportent à suffisance à tout le moins la preuve par vraisemblance, telle que requise par l’article 8.6 du Code civil, du lien causal querellé entre, d’une part, l’accident dont sont concurremment responsables [la sœur de la troisième  défenderesse] et [le demandeur] et, d’autre part, l’accouchement prématuré et le handicap [du premier défendeur] »

Par ces énonciations, dont il suit que l’arrêt attaqué considère que le fait que, sans le stress provoqué par l’accident, le premier défendeur ne serait pas né prématurément et handicapé est un fait dont, par sa nature même, il n’est pas possible d’exiger une preuve certaine, et que les trois premiers défendeurs établissent la vraisemblance de ce fait, l’arrêt, qui tient pour établie l’existence du lien de causalité entre l’accident, l’accouchement prématuré et le handicap du premier défendeur, justifie légalement sa décision de condamner les demandeurs à indemniser le préjudice subi par chacun des trois premiers défendeurs.

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