Assurance RC Auto : quoi de neuf ?

Introduction

La loi du 17 mars 2024 a introduit d’importantes réformes dans le cadre juridique régissant l’assurance obligatoire de la responsabilité civile automobile en Belgique. Cette loi modifie la loi du 21 novembre 1989 en transposant partiellement la directive européenne 2021/2118 et en renforçant la protection des personnes lésées en cas d’accident impliquant un véhicule automoteur.

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La responsabilité des mineurs dans le livre 6 du nouveau code civil belge

Le nouveau livre 6 du Code civil belge, entré en vigueur en 2024, réforme en profondeur le droit de la responsabilité civile en Belgique. Une section spécifique est consacrée à la responsabilité des mineurs et des personnes atteintes de troubles mentaux. Cet article analyse les nouvelles dispositions relatives à la responsabilité des mineurs de moins de 12 ans, des mineurs de 12 ans et plus, ainsi que le rôle des parents et tuteurs.

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Une certitude raisonnable

Cet arrêt interlocutoire rendu par la 4e chambre des Affaires civiles de la Cour d’appel concerne un accident survenu lors d’une course de motos le 13 août 2010. Les consorts A, pilotes amateurs, ont chuté à la suite d’un surgonflage des pneus de leurs motos dû à un défaut d’étalonnage d’un manomètre fabriqué par la société X.

Les consorts A ont assigné les sociétés Y et X, qui avaient apposé leur marque sur le manomètre, ainsi que leurs assureurs, en réparation de leur dommage sur la base de la loi du 25 février 1991 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux transposant la directive européenne 85/374/CEE.

La Cour est amenée à examiner si les conditions de cette responsabilité du fait des produits défectueux sont réunies à l’encontre des sociétés Y et X dans cette affaire d’accident lié à un manomètre défaillant. L’expert considérait que le manomètre était défectueux, mais il ne lui était pas possible de considérer avec certitude que ces défectuosités étaient en lien causal avec l’accident survenu.

Responsabilité de Y

1. Qualité de producteur de Y

Appliquant l’article 3 de la loi de 1991, la Cour considère que Y doit être regardée comme un producteur au même titre que X, dès lors qu’elle s’est présentée comme telle en apposant sa marque sur le produit.

Elle s’appuie sur un arrêt de la CJUE du 7 juillet 2022 qui a jugé que la directive impose une responsabilité solidaire du véritable producteur et de celui qui se présente comme tel.

2. Défaut du produit

La Cour constate, sur la base des constatations de l’expert judiciaire, que le manomètre présentait un défaut d’étalonnage le rendant défectueux au sens de l’article 5 de la loi.

L’expert a relevé un décalage de 0,75 Bar entre la pression indiquée et la pression réelle, ce qui a conduit à un surgonflage des pneus et à une perte d’adhérence à l’origine des chutes. Le défaut provenait d’un défaut d’assemblage.

La Cour en déduit que le défaut préexistait à la mise en circulation du produit.

3. Lien de causalité avec le dommage

Sur cette question cruciale du lien de causalité entre le défaut et les accidents, l’expert avait conclu à l’impossibilité de répondre avec certitude, relevant notamment que d’autres chutes étaient également survenues ce jour-là.

Cependant, la Cour relève que la certitude requise n’est qu’une certitude raisonnable, et non une certitude absolue ou scientifique. Elle estime que le lien causal est établi avec une certitude suffisante au vu des éléments suivants :

  1. Les consorts A ont très rapidement imputé leurs chutes à un surgonflage lié au manomètre défectueux, comme l’atteste un courrier 12 jours après les faits. Le mécanicien a également lié les accidents à la défectuosité constatée le jour même.
  2. Les constats techniques de l’expert confirment que le défaut était bien de nature à entraîner un surgonflage à l’origine d’une perte d’adhérence.
  3. Les accidents sont survenus dès le premier tour de piste pour chacun, dans des virages où le risque de perte de contrôle est accru, selon les témoignages concordants.

Bien que l’expert ait relevé l’usure de certains pneus, la Cour estime que ces éléments constituent un faisceau de présomptions graves, précises et concordantes permettant de retenir le lien de causalité.

La Cour souligne ainsi son indépendance vis-à-vis des conclusions de l’expert, dont l’avis n’a qu’une valeur indicative. En dépit de ses doutes, elle a estimé pouvoir retenir le lien causal au vu des autres éléments du dossier, la certitude absolue n’étant pas requise.

4. Incidence d’une faute du mécanicien

La Cour écarte l’argument des assureurs selon lequel la responsabilité de Y serait écartée ou limitée en raison d’une faute commise par le mécanicien qui n’a pas décelé le défaut.

Elle relève que le mécanicien était un tiers par rapport aux consorts A.

Elle ajoute qu’en tout état de cause, en l’absence du défaut, les accidents ne se seraient pas produits tels quels, de sorte que la responsabilité du producteur demeure engagée.

Conclusion

Par cet arrêt solidement motivé, la Cour d’appel fait une application remarquable des principes régissant la responsabilité du fait des produits défectueux. Elle démontre que les conditions de cette responsabilité sont réunies à l’encontre des sociétés Y et X dans cette affaire d’accident lié à un manomètre défaillant.

En rejetant les arguments des défenderesses, elle garantit une protection effective des victimes conformément aux objectifs de la directive européenne. Sa motivation éclaire les notions de défaut, de mise en circulation et de lien de causalité au regard de cette responsabilité particulière.

Surtout, la Cour affirme son indépendance vis-à-vis des conclusions de l’expert qui ne la lient pas en retenant le lien causal malgré ses doutes, démontrant que l’avis de l’expert n’a qu’une valeur indicative. Elle rappelle ainsi que la certitude absolue n’est pas requise, la certitude raisonnable suffit en matière de responsabilité civile.

La grande réforme du droit de la responsabilité extracontractuelle :

Après plusieurs années de travaux, la Belgique se dote d’un nouveau cadre juridique en matière de responsabilité civile extracontractuelle. Le livre 6 du Code civil, entré en vigueur le 1er octobre 2024, remplace les célèbres articles 1382 à 1386 bis et apporte de nombreux changements, tout en conservant certains principes fondamentaux. Cette réforme d’envergure vise à clarifier et moderniser un pan essentiel du droit, avec des implications majeures pour les citoyens, les entreprises et les assureurs. La dernière livraison du bulletin des assurances nous livre un intéressant article sous la plume de Laureen STEINIER.

Décryptage des principales nouveautés.

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