Dans un arrêt très attendu rendu le 20 mars 2024 (n° P.22.0088.F), la Cour de cassation de Belgique est venue rappeler le principe de la réparation intégrale du dommage en matière de responsabilité civile. En cassant partiellement la décision entreprise, la haute juridiction a censuré la réduction injustifiée de l’indemnité pour frais de déplacement allouée à la victime d’un accident de la route.

Les faits à l’origine du litige

L’affaire trouve son origine dans un accident de la circulation qui s’est produit le 15 avril 2018 à Arlon. Un piéton, J.P., avait été renversé par un véhicule, lui occasionnant de graves blessures ayant entraîné des incapacités permanentes. Après avoir indemnisé J.P., l’assureur du conducteur responsable, Ethias, a été assigné par la victime qui réclamait des dommages et intérêts complémentaires.

J.P. réclamait une indemnité de 581,70 euros pour les 1.662 kilomètres parcourus en relation avec l’accident, sur une base de 35 centimes par kilomètre. Cependant, au lieu d’octroyer l’indemnité demandée, le Tribunal n’a accordé que 500 euros pour ce poste de préjudice.

La violation du principe de réparation intégrale dénoncée

C’est cette réduction injustifiée de l’indemnité pour frais de déplacement que la Cour de cassation a censurée dans son arrêt. Selon la Haute juridiction, « le principe de la réparation intégrale et objective du dommage implique, notamment, que seul le dommage détermine l’ampleur de la réparation ».

Dès lors, réduire l’indemnité pour ces frais au seul motif que la victime « aurait pu, dans un esprit d’économie et afin de limiter ses frais, jumeler ces déplacements avec d’autres ou utiliser les transports en commun » constitue une violation de ce principe cardinal.

La Cour rappelle ainsi qu’une fois le dommage établi, le juge ne peut s’écarter de l’objectif de réparation intégrale que dans les cas strictement prévus par la loi. Toute autre considération d’opportunité est proscrite.

Le rétablissement du principe de réparation intégrale

En cassant le jugement sur ce point, la Cour de cassation rétablit pleinement l’exigence d’une réparation à la mesure exacte du préjudice subi par la victime, conformément à l’article 1382 de l’ancien Code civil.

« Le propre de la réparation est de rétablir aussi exactement que possible l’équivalent de la situation qui aurait existé si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu. » La Cour réaffirme ainsi avec fermeté que toute réduction de l’indemnité par rapport au préjudice réellement subi, sans justification légale, est prohibée.

Cette décision rappelle l’importance fondamentale du principe de réparation intégrale en droit de la responsabilité civile belge. Le juge ne dispose d’aucun pouvoir d’appréciation pour moduler le montant de l’indemnité en fonction de considérations subjectives. Son rôle se limite à évaluer aussi précisément que possible l’étendue du dommage, afin d’accorder une réparation rigoureusement équivalente.

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