La Cour d’Appel de Mons, dans un arrêt du 8 mars 2016 a eu l’occasion de rappeler, d’une part, qu’il appartenait le cas échéant aux tribunaux de requalifier les clauses d’exclusion en clause de déchéance (en ce qu’il sanctionne un manquement de son assuré postérieur à la naissance du contrat et nonobstant les termes employés, une disposition des conditions générales de la SA GENERALI doit s’analyser non comme une clause d’exclusion, mais comme une clause de déchéance) et, d’autre part, qu’une clause de déchéance revêt un caractère personnel et ne peut être étendue à l’ensemble des assurés couverts par la garantie.

La SA ETHIAS est l’assureur incendie d’un immeuble divisé en 6 chambres avec pièces communes (cuisine, sanitaires).

Le 22.11.2008, cet immeuble fut ravagé par un incendie d’origine volontaire qui a pris naissance au rez-de-chaussée dans la chambre meublée louée à M. G.T. Un des locataires de l’immeuble, M. M.D. décéda des suites de l’incendie.

M. G.T est placé sous statut d’administration provisoire et est assuré auprès de la SA GENERALI BELGIUM.

A l’époque des faits M. G.T entretenait une relation amoureuse depuis quelques mois avec un sieur A.G. qu’il hébergeait

Monsieur AG est à l’origine d’un sinistre intentionnel.

La responsabilité de M. G.T sera retenue par la Cour d’Appel de Mons.

En vertu de l’article 1733 du Code civil le preneur répond de l’incendie à moins qu’il ne prouve que celui-ci s’est déclaré sans sa faute.
En application de l’article 1735 du Code civil, le locataire est tenu des dégradations et pertes qui surviennent par le fait des personnes de sa maison.

Le preneur ne s’exonérera que s’il résulte des circonstances qu’il n’a pu commettre de faute, qu’il a été dans l’impossibilité d’en commettre une et, partant, que la cause de l’incendie doit nécessairement être attribuée à un fait qui lui est étranger.

Il appartient donc au preneur de prouver que, sans aucun doute, l’incendie s’est déclaré sans sa faute ou sans la faute d’une personne dont il doit répondre, les exigences quant à la preuve ne pouvant se satisfaire d’une probabilité d’absence de faute (Mons, 04.03.1993, RGD 1993, 252).

La responsabilité édictée par l’article 1735 doit être entendue dans le sens le plus général, le preneur est responsable non seulement du fait des siens, des personnes de sa famille, mais aussi des étrangers qu’il reçoit dans la maison louée (invités, amis, etc…).

En l’occurrence il ressort des pièces produites aux débats que M. A.G. se trouvait dans la chambre de M. G.T avec l’accord de celui-ci et ce même si à l’époque M. G.T envisageait de rompre avec son compagnon.

M. G.T doit donc répondre de la faute de ce dernier sur pied des articles 1733 et suivants du Code civil.

Il ressort des pièces produites aux débats que M. G.T hébergeait M. G. depuis plusieurs mois.

Ce dernier doit donc bien être considéré comme une personne vivant au foyer du preneur et donc comme un assuré au sens des conditions générales de la police de la SA GENERALI.

La SA GENERALI se prévaut de ses conditions générales pour refuser son intervention. L’article concerné est inspiré de l’article 8 de la loi du 25.06.1992 sur le contrat d’assurance terrestre (actuellement article 62 de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances) aux termes duquel l’assureur ne peut être tenu de fournir sa garantie à l’égard de quiconque a causé intentionnellement le sinistre.

La Cour vérifie si la clause du contrat présentée sous la qualification d’exclusion ne constitue pas en réalité une clause de déchéance.

L’exclusion est une absence de droit, c’est-à-dire que la situation se trouve en dehors de la couverture d’assurance. Tandis que la déchéance est un retrait de droit, ce qui signifie que le sinistre est en principe dans le périmètre de la garantie, mais qu’en raison d’un le manquement à une obligation déterminée du contrat, l’assuré se voit privé de la couverture d’assurance.

En l’espèce en ce qu’il sanctionne un manquement de son assuré postérieur à la naissance du contrat et nonobstant les termes employés, la disposition des conditions générales de la SA GENERALI doit s’analyser non comme une clause d’exclusion, mais comme une clause de déchéance.

Une clause de déchéance revêt un caractère personnel et ne peut être étendue à l’ensemble des assurés couverts par la garantie (Fontaine, Précis de droit des assurances, 2006, p.254).

Une clause qui aurait l’effet inverse et priverait de garantie tous les assurés autres que celui auteur d’une faute intentionnelle devrait être considérée comme contraire aux dispositions impératives que sont les articles 8 et 11 de la loi du 25.06.1992 et donc nulle (Cass 04.03.2013, RGAR 2013, 15 020).

Il s’en déduit que si M. A.G. ne peut bénéficier de la garantie du contrat conclu entre la SA GENERALI et M. G.T il n’en est pas de même de ce dernier qui n’a en aucune manière contribué à la propagation de l’incendie litigieux de manière intentionnelle.

C’est donc à tort que le premier juge a pu décider que les dommages ayant été causés intentionnellement par M. A.G., la SA GENERALI ne serait pas tenue de couvrir la responsabilité de M. G.T.

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